« Je n’ai guère vu trace d’empreinte de dinosaure, mais les arbres de Muirwood, les redwoods, n’ont après tout qu’un ou deux mille ans… Etonnant, ces arbres générent des acides qui rendent leur pulpe très résistante à la pourriture, si bien que cette branche d’arbre que tu vois là parterre est peut-être tombée du temps où le Général Lee rendaient les armes, ou peut-être même du temps où il combattait durant la guerre mexicaine aux côtés de Grant (qui a depuis reçu l’insigne honneur d’avoir sa gueule imprimée sur les billets de 50$!), pour la conquête de quelques espaces désertiques et surtout, de la Californie.
Venait ensuite dans l’histoire une date qui sera peut-être synonyme de « champion » le 3 février prochaine, puisque les 49ers de San Francisco, qui doivent affronter les Baltimore Ravens lors du superball, tirent leur nom de la date de la première ruée vers l’or, en 1849, juste après que l’ultime frontière ait été ouverte par la soldatesque américaine.
Il paraît que bon nombre de pauvres bougres sont morts en traversant la Sierra Nevada, on ne leur avait pas dit qu’il y aurait de la neige…
On leur avait plutôt évoqué les délices de la côte ouest, tu m’étonnes !
A SF aujourd’hui, grand soleil encore et toujours, et des températures avoisinant les 20 degrés Celsius au meilleur de l’après-midi. La végétation de plantes grasses, arbres fruitiers, citrons aux branches, fleurs au fusil et magnolia dans les cheveux, mais en effet les hippies ont perdu presque tout le terrain… ce n’est plus permis de se ballader tout nu ! Et oublie les gars qui jettent leur clé, c’est plutôt de mettre la clé sous le paillasson dont il s’agit, si ton épicerie n’est pas assez branchée ou si ta start-up manque de racines financières et de social network.
Qu’est-ce que c’est, un hippster ? Bonne question ! Il a quelque chose du bourgeois bohême européen, pour sûr, avec le technologique en plus. Un « bobotechno » en somme, mais ce n’est pas encore une bonne définition. La meilleure je crois serait : le hippster est quelqu’un qui pense qu’une chose est bonne pour lui dans la mesure où elle le distingue des autres. C’est l’instinct à se distinguer devenu religion, et qui se couple avec une manière « différente » de consommer. Population essentiellement urbaine, très à la page forcément, qui achète des magazines plutôt que des journeaux, et qui aime vivre dans des quartiers popu reconvertis par une avant-garde ou une autre en crèche à talents et en réceptacles du mécénat made in classe moyenne, dont cette dernière tire l’avantage de la distinction, etc.
Il pourrait arriver qu’un hippster fasse du base-jump, mais il y a peu de chance que cela devienne une passion. De toute façon, le hippster, ce n’est pas un individu ou une population, c’est une série de comportements qui engendre des effets de masse. Le base-jump aussi, on peut y arriver à travers une passion pour la distinction, mais il y a tant de voies plus faciles…
Le base-jump c’est plutôt une passion pour le dépassement, le risque, le « thrill ». Le gars qui m’a pris en stop, Johnny Strange, a commencé par le parapente, ensuite il a pris l’avion pour en sauter et, après deux minutes de chute libre, ouvrir son parachute. L’étape suivante, le base-jump, consiste à sauter depuis un point arrêté, le sommet d’une falaise, ou d’une antenne de télévision, en chute libre. Donc tu es au bord de la falaise et tu sautes, hop ! Et assez vite tu te débrouilles pour ouvrir ton parachute !!
Johnny Strange c’est geek du saut dans le vide, c’est-à-dire un type qui a sillonné le domaine de A à Z : il connaît tous les détails techniques, les postures de vol et les meilleurs « spots » pour sauter sans filet. Le geek c’est ça, c’est le super-spécialiste, dont la spécialisation n’est a priori pas liée à son travail, quoiqu’elle le soit souvent. Ce mec là qui connaît tout ce qui concerne la première console Nitendo, qui poursuit inlassablement la question des trous noirs bien qu’il soit maraîcher, ou qui passe tout son fric à bidouiller son vélo ou sa bagnole. Donc en gros tu peux être un geek et un hippster et faire du base-jump, mais le geek tend à devenir un peu trop radical pour rester hippster, et le base-jumper par passion ne pourra guère que se lasser de sa geekitude s’il ne trouve pas d’autres champs où se confronter à l’extrême.
Je viens de me souvenir que le Séquoia géant est L’arbre le plus massif, et que le Redwood est L’arbre le plus haut. »